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LA
VIE EN BOURGOGNE AU RYTHME DES SAISONS
Les saisons du
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Les saisons du

LES SAISONS DU LABOUREUR
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ETE

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La Saint Jean-Baptiste (29 août) est une limite dans la vie
agraire. Foins et moissons sont rentrés. La vaine pâture a
étendu partout ses droits. Les mésus deviennent l'exception.
A Renève, les sergents ne font rapport de mésus qu'entre la
Saint Georges et la Saint Jean-Baptiste. Après cette date,
ils ne peuvent faire de prise de bestiaux en mésus que sur
plainte (terrier sup.). Seuls les bois restent interdits en
ce temps de grenier (généralement de la Saint Michel à la
Saint André). C'est la période inverse de l'«étroite saison
».
Les
paysans paraissent tentés d'enlever alors les haies sèches,
dans leur désir de les utiliser pour le chauffage. Mais la
seigneurie n'est pas favorable à cette prétention qui serait
un gaspillage de bois. Peut-être même a-t-elle parfois poussé
au développement de la haie permanente.
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AUTOMNE

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A l'automne, c'est vers la sole des blés que se reportent
les efforts. En juillet, on lui a donné un second coup de
charrue -rebeuil, rebulier, recas, relier, retranche, retrait,
biner. Il faut maintenant faire le labour décisif ; c'est
le temps de la corvée du vain « qu'est le temps que l'on sème
les bleds ». Septembre est ainsi le mois de la benison, la
semaille des «bons bleds » ou des «quatre grains » : froment, seigle,
orge et avoine d'hiver. On mélange souvent froment et seigle
pour en avoir le conceau ou méteil.
On
a donné le troisième et dernier coup de charrue (Il est rare
de trouver 4 coups de charrue pour les blés d'hiver. Un exemple
à Vosne en 1765 : les 4 coups de charrue coûtent 12 livres
par journal) après avoir mis dans les terres tout l'engrais
dont on a pu disposer : fumier, boues cendres, feuilles, mousses
de bois et de roches, bruyères, genêts
0n sème aux environs de la Saint Michel-Archange (20
septembre)
Le
grain est enterré avec la herse à dents de bois ou de fer.
De nouveau, on crie les fronteaux pour la soie emblavée, et
la bouchure, particulièrement soignée, est placée vers la
Saint Martin. Que la benison se fasse bien est le grand voeu
de l'année. Si le temps est pluvieux, les travaux sont durs
et longs ; il faut mettre en terre le double de la semence
normales, par crainte de manques, et c'est immédiatement un
gros déficit.
On
a cueilli les turquis (le maïs), moissonné la navette, «tiré»
les chenevières sur lesquelles est parfois établi un ban,
et on a fait rouir le chanvre au nazoir ou rutoir, ou à défaut
dans les mares ou les ruisseaux. Quand la chose est permise,
les pauvres gens, les enfants vont ramasser les poires et
pommes sauvages, les prunelles au long des haies. On maraude
aussi, près des arbres des vignes.
En
septembre, le soir, on teille le chanvre ; le travail se fait
souvent dans les rues, devant les maisons, et prend l'allure
d'une petite fête villageoise, autour des feux de chènevottes.
La gaieté ne va pas sans quelques abus que la justice seigneuriale
tente d'arrêter. On joue avec les flammèches malgré le danger
de pareilles brullaires . On vient y faire griller les rôts
(épis de maïs pas encore parvenus à maturité) pris aux champs
voisins par les jeunes gens.
La
Saint Rémi (Ier octobre) est une grande échéance ; à cette
date se paient un peu partout la poule de feu et les cens.
Le paysan va au bois faire des fagots dans les taillis. Souvent
il a fallu payer le lot de forêt, car beaucoup de villages
n'ont plus leurs bois communaux. Quand on a pu garder cette
précieuse richesse, le partage de la coupe se fait en novembre,
en présence du procureur d'office et des dizeniers nommés
par la communauté. Parfois la moitié du bois est divisée par
égales portions, l'autre étant « au marc la livre», c'est
à dire proportionnelle à la taille. Le seigneur a souvent
sa part comme «premier habitant», et le curé, la sienne comme
desservant et «premier paroissien ».
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HIVER

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C'est pendant l'hiver que la justice seigneuriale essaie d'obtenir
le nettoyage des abreuvoirs, la réparation des fontaines,
la remise en ordre des chemins à l'intérieur et à la périphérie
du village. A Lantenay, en 1778, ordre de réparer les chemins
et les fontaines après les semailles. Le procureur de communauté
donne la liste des absents au moment du travail. On se plaint
pendant tout le siècle du mauvais état des rues, souvent défoncées,
encombrées de détritus et d'immondices. On essaie de faire
mettre au net les courcières, fossés d'écoulement des eaux.
Mais il est difficile d'obtenir ces corvées villageoises.
« Tout le monde sait que le plus grand nombre des chemins
finérots et même que les rues de plusieurs villages sont impraticables
pour les voitures sans que les habitants se mettent en devoir
d'y remédier. L'autorité du gouvernement peut seule les forcer
à se procurer un bien que jamais ils ne chercheront à se procurer
par eux-mêmes (observations des Élus, 1782, C 4401). A Vougeot,
en 1715, les habitants ont jeté pailles et fumiers en si grande
quantité que l'on ne scauroit passer par le village » (C 4224).
A Alise-Sainte-Reine, les tourneurs de chapelets jettent des
esquilles d'os par les rues (B 2 965 11).
Le
paysan répugne à entretenir sa bourgade ; le plus souvent,
il faut amodier ces tâches, ce qui grève encore davantage
le budget communal. A Corrombles, le procureur d'office signale
en 1765 au bailli du marquisat d'Époisses l'inutilité des
règlements : « Chacun avoue qu'il seroit de son avantage
de faciliter les différens accès du village, soit pour déblaver
les héritages, soit pour en transporter ou y importer les
denrées. Mais faut-il opérer ? Chacun s'enferme dans un interest
particulier sans vouloir concourir à celui du public »
Pour
les hommes, le grand travail de l'hiver est le battage des
grains. Dès la fin de l'été, on a remis en état l'aire de
la grange, en la chargeant de terre glaise - terre d'aubue
- prise souvent aux chemins villageois. La pénible tâche s'accomplit
au fléau; elle dure souvent jusqu'au printemps dans les grosses
fermes. Un batteur travaille environ 25 gerbes à la journée,
soit quatre mesures de grain. A Sainte-Sabine, un domaine
emploie du 14 novembre au 3 avril, trois batteurs qui font
chacun 108 journées à 12 sols. Comme les journées sont courtes,
il faut besogner encore le soir, à la chandelle ou à la lampe.
L'hiver
est long, difficile si le temps est froid ou si l'année a
été mauvaise. Quelques veillées, quelques fêtes, sans doute
surtout dans le foyer des aisés.
Noël,
fête des Rois. C'est le moment où le fermier du comte de Jaucourt
qui tient le moulin d'Arconcey porte à son propriétaire «une
demy-mesure de fleur de froment pour le gâteau des Roys ».
Car Noël a gardé la vieille tradition des oblations : maintes
redevances se paient le lendemain 26 décembre, jour de saint
Étienne.
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LES
SAISONS DU VIGNERON
Les saisons du
(retour en haut de la page)
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HIVER

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L'hiver est venu. A la maison, on répare les benatons avec
le coudre et l'osier (avec le coudre, on refait les tours
et limons de benaton), et les cercles de cuves avec les brins
de frêne et de coudrier. La vie est facile quand l'année a
été bonne; l'âne rapporte quelque gain de voiturage. On tue
un porc qui a été nourri avec les glands, ou qu'on est allé
chercher tout simplement à la foire voisine, souvent grâce
aux avances du propriétaire. Vers 1740, un porc coûte de 20
à 25 livres. Mais parfois il faut se contenter de la morue
et des harengs. 1740 (« une main de morue de 6 livres
à 4 sols 6 deniers la livre ») 1752 (« un quarteron d'harans
blancs, 25 sols ).
C'est
en février que le vigneron reprend son travail. Après un choix
minutieux des boutures ou chapons, il constitue les nouvelles
vignes ou plantes dans les terrains en «toppes ou sainfoins»
pendant trois ou quatre ans. Le sol a été labouré avec soin
; on l'a fumé à haut prix, car le fumier est cher et les laboureurs
«n'en vendent qu'à toute extrémité». Pendant toute l'année,
la plante demandera un travail assidu et particulièrement
quatre coups de bêche; les mauvaises herbes sont arrachées
« pour écarter le gros bétail». Dans les intervalles des plants,
on sème du froment, des haricots dont la récolte est estimée
dans le prix du travail payé par le propriétaire. D'ailleurs
cette pratique n'est pas toujours permise. Les alcades en
1739 demandent que les légumes et les arbres soient défendus
dans les vignes.
Dans
les vieilles vignes, on comble les vides par des marcottes
ou par la plantation de chevolées (boutures) prises dans les provins de l'année.
La greffe n'est à peu près pas pratiquée. On reporte aussi
la terre dans le haut des vignes : dur travail qui rapporte
quelque argent.
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PRINTEMPS

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Au début de mars le gros travail commence : il s'agit de donner
le le « premier coup ». Avec la maille (« Instrument à bêcher
dont la pointe est un peu en forme de Pique à manche recourbé »),
le vigneron défonce le sol battu par l'hiver. Ce piochage
atteint 20 à 25 centimètres de profondeur. Il faut trois ou
quatre semaines de suite faire cette pénible tâche ; on y
peine chaque jour, sauf en temps de neige ou de gelée. Vient
ensuite le paisselage souvent confié aux femmes ou aux enfants,
et qui est terminé « avant que la terre ne soit durcie par
le hâle de mars ». Chaque paisseau est planté au pied du cep
«sans ordre simétrique et alligné » ; il a la grosseur du
pouce, et une hauteur de cinq pieds; on y fixe le cep à l'aide
d'osier ou de chanvre trempé.
Souvent
des pluies douces accompagnent cette première façon. Ces tireboures
font éclater les bourgeons ; du bouton sort un fruit « dont
la couleur vermillonnée réjouit». Mais dès avril, il faut
donner la seconde façon, avec le fessou ou fosseur :
« Pioche à manche recourbé comme la maille, mais portant un
taillant de la largeur de 6 pouces » ; on trouve aussi vesou,
fesou. Un fesou coûte 24 sois en 1747 à Volnay (G 4167).
Travail
moins pénible que le premier coup, accompli avec courage,
si la gelée n'a pas atteint la vigne, mais avec « dégout»
et «jérémiades » si les nouvelles pousses ont été ravagées
par le froid. Chaque année en effet, la Côte craint les gelées
de printemps. Pendant tout le siècle, on évoquera le souvenir
de la lune rousse de 1736 qui, les 14 et 16 mai, jeta le désastre
dans tout le vignoble. «Les sarments avoient 18 à 20 pouces
de hauteur; à peine put-on trouver une taille pour l'année
suivante».
A
Volnay, le fléau atteignit 1.200 ouvrées, soit 50 hectares.
En 1741, la neige du 3 mai perdit entièrement les bonnes vignes.
Le curé de Volnay mentionne dans son journal : « la neige
qui tombast pendant la matinée et qui geloit sur les raisins
comme sur les habits en sorte qu'au premier coup de soleil
les raisins et les feuilles furent en un moment réduits en
cendre ».
En
mai, les femmes et les enfants accolent les rameaux de la
vigne avec la lieure faite de paille et plus rarement de chanvre.
Le
beau temps favorise la fleur mais les pluies froides provoquent
la coulaison. Et toujours se poursuit le nettoyage de la vigne
; on en tire les herbes pour la nourriture des vaches.
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ETE

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Juin et juillet sont la saison du troisième coup qu'on donne
(le préférence après la pluie et hors des journées chaudes.
Là encore, le travail se fait gaiement si le raisin est beau,
et si l'orvale n'est pas passée. Car périodiquement, la grêle
ravage le vignoble, diminuant ou anéantissant la récolte.
Le 19 mai 1732, Volnay fut atteint par un terrible coup ;
dans tout le finage, on ne recueillit que huit feuillettes
grâce aux raisins poussés après l'orage. Même si le désastre
est moins grand, le vin prend «le goût de la grêle» et ne
se vend pas. Aussi enlève-t-on soigneusement les grains touchés.
Le malheur est que de pareils maux font sentir leurs effets
pendant plusieurs années. Les ceps sont «maltraités» ; des
ravines se sont creusées sur les pentes ; le bois de la vigne
revenu hâtivement et en mauvaise saison ne peut nourrir complètement
le raisin ; la récolte de l'année suivante est dépréciée.
Au total, un redoutable accident contre lequel on demande
la protection divine. Dès les premières menaces d'orage, le
curé récite la passion .
Les
autres maux sont faibles en face de la grêle. La chaleur mêlée
aux pluies fréquentes provoque le rougeot
(les feuilles roussissent et sèchent). Un petit scarabée
- l'« écrivain» - fait sécher les feuilles et rend le raisin
galeux. L'« écrivain de terre » attaque les racines.
A
la fin de juillet, le vigneron, et le plus souvent son fils
et son valet, partent «en moisson» dans la plaine. C'est le
temps où la vigne laisse quelque répit qui donne une bonne
occasion de gagner de l'argent. On s'en va après avoir demandé
une avance au propriétaire.
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AUTOMNE

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Dans la vigne où l'on revient, on connaît une dernière crainte :
les pluies et les froids de septembre. Ils peuvent être une
catastrophe : le raisin pourrit, la vendange doit être avancée
et le vin est sans qualité. La nuit froide du 20 septembre
1751 à Volnay « saisit tellement le raisin partout qu'il
ne put absolument meurir davantage, quoiqu'on attendit jusqu'au
5 octobre pour le vendanger ».
Mais
il est heureusement des automnes plus aimables. Alors la vendange
s'annonce bien. La garde des précieux raisins par les vigniers
est partout active, de jour et de nuit. Ceux-ci ont été choisis
dès la Saint Laurent. Même à Fontenay dans un vignoble médiocre,
il en coûte chaque année 7 à 8 livres à l'abbaye pour la surveillance
des 200 ouvrées. On se méfie des maraudeurs, des enfants qui
cherchent des escargots, et de tous ceux qui volent des raisins
« depuis qu'ils commencent à prendre de la couleur - ce que
l'on appelle vérer en Bourgogne - jusqu'au temps de la maturité
»
Quelque
temps avant la vendange, tout, le monde s'est mis au désherbage
de la vigne, à la main. Les prud'hommes commencent la visite
du finage afin de pouvoir faire trois rapports successifs
aux échevins sur la maturité des raisins. Choix très
délicat en effet que celui du jour de vendange. On s'entoure
des conseils de gens avertis. Il faut se glisser parfois à
travers le mauvais temps. Les avis vont leur train; on critique
ou on approuve les prud'hommes. La qualité du vin est en jeu.
On évite les vents froids qui ôtent la couleur ; on craint
surtout la pluie qui risque de faire tourner le vin au cours
de l'année. On préfère vendanger un peu tôt car si l'on commence
trop tard, le vin prendra le « goût de vieux ».
Le
ban de vendange est général. Le seigneur ordonne l'ouverture
des travaux. Ses raisins sont récoltés un jour avant ceux
du finage; parfois même, il a droit à deux jours francs. A
Saffres, il est précisé que la vendange seigneuriale doit
être d'abord entièrement achevée.
Le
ban peut être très compliqué. A Saint-Vivant et Curtil. on
divise le finage en quatre sections qui ont chacune leurs
règlements ; il semble qu'il en soit de même à Arcenant. Là,
les habitants sont « tenus de faire savoir les bancs à mondit
seigneur de Saint Vivant ou à son facteur, lequel prend et
retient à lui les deux premiers bancs ou les deux derniers
».
Les
infractions, dans l'ensemble, sont rares. La discipline est
maintenue sévèrement par la seigneurie et les amendes pleuvent
dru sur les délinquants. Le 21 septembre 1774, 38 vignerons
de Volnay, Pommard et Monthélie « encouragés par le beau temps»
commencent la cueillette, bien que le ban l'ait fixée au 22.
Les officiers de la châtellenie dressent procès-verbal, font
assigner les coupables et les condamnent à 30 livres; il en
coûte en définitive plus de 42 livres à chacun d'eux.
De
toute façon, il faut aller vite. Le particulier proportionne
le nombre de vendangeurs à sa récolte, de manière à finir
dans la journée. En général, le vignoble de la Côte est «
balayé dans cinq ou six jours». C'est une explosion de travail
et un afflux de main d’œuvre. Il faut des vendangeurs, des
hostiers ou porte-paniers, des âniers, des conducteurs.
La
date d'ouverture des vendanges «est annoncée à son de trompette
dans toutes les places. Bientôt les campagnes en sont instruites.
Les habitants en sortent par milliers. Beaune qui est le lieu
principal est le rendez vous de tous ces pauvres gens ».
Ainsi la plaine déferle sur la Côte, retour de la vague qui,
deux mois plus tôt, emportait les vignerons vers les moissons
du Pays bas.
La
vendange est donc le bon moment pour les pauvres. On gagne
sa journée, on mange mieux que d'habitude, et le vin ne manque
pas Il. Pourtant, les récoltants essaient de payer au plus
bas la main-d’œuvre nécessaire. on cherche à éviter la simultanéité
dans les vendanges d'une même région ; on y parvient en général
puisque l'ouverture est fixée officiellement sur rapport des
prud'hommes.
Mais
parfois, des circonstances particulières provoquent la hausse.
Si la pluie ou le froid menacent, le temps presse. Chaque
communauté se hâte de récolter. Le curé de Volnay raconte
l'extraordinaire montée des prix qui se produisit en octobre
1740, par suite de la nécessité de cueillir rapidement et
de la rareté accidentelle des vendangeurs. Les salaires triplèrent
ou quadruplèrent.
Mais
si l'on peut profiter de l'abondance de la main-d’œuvre ou
des délais offerts par le beau temps, les prix du travail
baissent. Il n'est pas de domaine où la variation des salaires
soit plus grande que dans la vendange. En 1780, Chorev et
Bligny-sous-Beaune qui ont la chance de pouvoir cueillir le
14 septembre par une belle journée, paient 6 et 8 sols ; le
18 septembre, à Volnay, « la pluie a fait paier les vendangeurs,
24, 26 et 30 sols ».
Le
vin est fait, il faut régler la dîme ; celle-ci se lève au
jour annoncé par le bénéficiaire du droit, à moins qu'elle
ne soit due en raisins et perçue alors au moment de la vendange.
En maints lieux, le curé, réclame son droit de passion qui
n'est pas négligeable pour lui, et il envoie à cette fin son
préposé de maison en maison. Le recteur d'école fait aussi
sa «quête ».
Il
faut vendre le vin. Le métayer peut se charger d'écouler sa
portion, mais souvent il doit trop au propriétaire pour garder
son indépendance. Dans le domaine de la cure de Volnay, le
vin est presque toujours vendu d'ensemble. A Morey, les religieux
de Saint-Denis de Nuits reprennent aux vignerons leur part
de vin à un prix d'ailleurs inférieur au cours probable sans
que les risques de la mévente et l'incertitude des prix justifient
toujours cette diminution. Ainsi le vin de Morey qui se vend
de 230 à 260 livres la queue en 1775, est compté 165 livres
seulement au vigneron. En 1777, le taux pour les vignerons
est 245 livres; la vente réelle se fait moitié à 250 et moitié
à 450. De temps à autre, généralement aussitôt après la vente
du vin, le compte est arrêté entre le propriétaire et le vigneron.
Règlement amiable le plus souvent, mais qui peut prendre plus
de solennité en cas de contestation et de procès ; on appelle
alors des témoins. Le compte est assez minutieux car tout
au long de l'année se sont égrenées les avances. Le livre
de raison du propriétaire en fait foi.
Rien
de plus varié que ces avances. Les unes ont trait à l'exploitation
elle-même : achat de fessous, de faucilles, de paisseaux,
de chanvre. D'autres doivent couvrir les dépenses journalières
de la maison, et ce sont les motifs les plus inattendus. Il
a fallu aider le vigneron à trouver les subsistances nécessaires,
surtout dans les années difficiles, lui procurer en particulier
du grain à bon prix, car la consommation du froment est partout
importante dans la Côte, sauf dans les temps de grande pénurie.
Pour payer la taille, pour mener les jeunes gens au tirage
de la milice à Dijon ou à Beaune, on est allé chercher de
l'argent chez le maître. Toutes ces dettes ont été enregistrées
au jour le jour. Quelques exemples à Volnay : 31 sols pour
un cierge ; 17 sols pour un pain bénit; 36 sols pour faire
« racomoder » des souliers; 6 livres pour aller à la foire
de Chagny; 6 livres pour ce que [le vigneron] devoit à la
dévotion de saint Vincent ; 55 sols pour une paire de bas;
6 livres pour payer « Guilampé, chirurgien à Mursault »; 19
livres pour payer un cochon ; 5 sols pour « aller boire les
vins d'un marché de paisseaux »
Que
reste-t-il en fin de compte au vigneron ? Le solde est rarement
positif pour lui et bien qu'il n'ait pas une valeur absolue
pour traduire le profit du métayer de la vigne, il est probable
qu'il mesure assez bien le niveau de ses gains.
A
peine les vendangeurs ont-ils quitté la vigne que le grappillage
commence. Il se ferait même plus tôt si les règlements de
police n'intervenaient avec rudesse. A la Saint-Rémi, pâtres
et enfants remplissent leurs «botes et hotereaux » des fruits
venus aux arbres des vignes.
Le
travail de l'année s'achève. On arrache les paisseaux, on
les met à l'abri car ils doivent durer le plus longtemps possible.
On les taille pour l'année suivante. Et pour renouveler partiellement
la provision, on en va prendre au bois si l'on y a droit.
Le droit de prendre des paisseaux dans les bois est très discuté.
Il peut être reconnu au terrier : ainsi à Antilly & sauf
les quatre bois deffendus qui sont le chesne, fresne, orme
et vernes , (Inv. 48, f° 249 v°). A Chamboeuf, on ne peut
couper les paisseaux, que de la Saint Denis à Noël (B 2 492
11). Au Meix, défense de les prendre sans permission (B 10856).
Les vignolles sont rassemblées en fagots pour le feu.
De
la fin d'octobre jusqu'aux premières gelées, c est le provignage
qui occupe essentiellement le vigneron, puis les édifices
d'hiver. Dans les vignes dépouillées, on laisse errer les
bestiaux, mais l'arrêt du 2 août 1749 interdit cet usage.
« Le gros bétail foule et brise les ceps et les échalas; les
moutons rongent les jets qui font l'espérance de la récolte
prochaine et les pourceaux déracinent les provins ». Cet usage,
dénoncé comme général en hiver, même dans les « vignobles
précieux » sera dorénavant interdit, même au propriétaire
dans sa vigne. La fumure n'est pas toujours permise dans les
grands crus; elle se pratique couramment ailleurs.
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Source |
Pierre
de SAINT-JACOB
Les paysans de la Bourgogne au dernier siècle de l'Ancien
Régime
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Les saisons du
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