Carmagnole au Bois des Issards
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L'histoire
du Bois des Issards racontée par des témoins
Ce
qu'ils en ont dit :
Jean-François
RENARD, curé de St Martin de La Mer, le 15 décembre
1790, fait l'inventaire des biens qui appartiennent à
la paroisse, parmi lesquels il y a une parcelle du bois des Issards.
Son texte apporte
quelques précisions sur le contexte dans lequel naît
l'affaire du Bois des Issards : Un manque certain de clarté
sur la propriété des parcelles de ce bois.
" Agnin
Dupuys tant en son nom que pour et au nom dudit Benoist Dupuis et
Jacquemin Dupuis & confessent devoir audit Curé la somme
de 21 deniers de taille chacun an audit terme échues et assignés
sur six journaux de terre assis audit finage au lieudit Sur les
Issards tenant d’une part au grand chemin tendant de Saulieu à
Autun, d’autre part à la terre de l’Eglise dudit St Martin,
duquel héritage ils confessent être tenementois (?)
et laditte charge qu’ils promettent payer tant qu’ils le possèderont
dont ils obligent leur corps et biens presens et avenir comme dessus.
Soumet & renonçant fait les an et jour et présence
que dessus.
Lesdits
6 journaux ayant été abandonnés de tems immémorial
ont fait partie des communaux en broussailles dud St Martin. Les
habitants dudit lieu, ainsi que les curés y ont fait couper,
selon leurs besoins, du bois propre aux clotures, jusqu’en 1788,
tems auquel Mr le Duc de Nevers faisant renouveler son terrier,
on découvrit que tous ces bois en brossailles et landes étoient
des propriétés de plusieurs particuliers qui devaient
payer des cens ou redevances énoncées dans les anciens
terriers. En conséquence le commissaire chargé de
la rénovation du papier terrier fit sommation auxdits habitans
de reconnoitre toute la masse de ces petits bois sous les mêmes
redevances (après avoir invité par différentes
publications tous ceux qui avoient des titres de propriété
à les faire apparoire) ; que faute par eux de s’y soumettre,
le Seigr Duc s’en empareroit. Les habitans consentirent
volontiers a passer solidairement reconnoissance audit Seigneur,
et procédèrent ensuite à un partage égal
entre eux et en passèrent acte dans lequel ils réservent
le droit d’autrui, s’obligeant à relacher à ceux qui
auraient des titres de propriété dans ledit canton.
En conséquence le Curé actuel de St Martin, en vertu
du susdit art 6 de son petit terrier se mit en possession des consentement
desdits habitans, de la quantité de 6 journaux de terre y
énoncé. D’ailleurs le local desd 6 journaux n’est
grevé d’aucun cens envers led Seigr Duc.
Ledit
Curé actuel a fait beaucoup de dépenses depuis trois
ans pour clore et mettre en nature de bois taillis cette petite
portion qui va être réclamée par les habitants
dudit St Martin comme anciens possesseurs. Ils s’en sont même
de nouveau emparés, y ont fait pacager, tout débouché
et quelques uns ont coupés des balivaux ... dessus
seroit de remettre cette portion au Sr Couhard de La Mer, qui vient
d’acquérir une maison à St Martin, qu’il a donné
à un particulier qui n’a pas la faculté de couper
la moindre quantité de bois pour son chauffage, je pense
que MMrs du district ne s’y opposeront pas. Ils ont agi
ainsi dans la crainte de voir vendre ce morceau qu’ils ne verroient
pas paisiblement leur échapper.
D’ailleurs s’ils
consentoient à le laisser à la Cure, ils s’étoient
reservé dans leur acte de partage la faculté de passage
lorsque le bois seroit defensable, je désire donc qu’il reste
aux habitans, s’il n’est pas réservé à la Cure
qui s’en étoit emparé comme bien dont on ne connaissois
pas les propriétaires et dont la charge y annexée
lui venoit de fondation."
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L'avocat
qui rédige une requête au Préfet, le Comte de
Lachedenède, le 18 novembre 1817
[ndla : ce
texte indique également quelle version "politiquement
correcte" de la période révolutionnaire était
en vigueur dans les premières années de la Restauration]
Sa version accréditerait
la thèse d'un conflit entre deux factions municipales, mais
les arguments d'un avocat ne sont pas nécessairement la vérité
historique ...
"Jean
Lhomme, propriétaire demeurant à St Martin de la Mert,
canton de Liernais, arrondissement de Beaune, Côte d'or, mari
et exerçant les actions de Reine Charles sa femme, fille
et héritière de François Charles, chantre de
l'église dudit St Martin
Dominique
Imbert, petit-fils de Nicolas, dudit St Martin
Lazarre
Collenot, laboureur au même lieu de St Martin, actuellement
maire de laditte commune
Martin
Bouremard, manouvrier au même lieu, mari et exerçant
les actions de Jeanne Geay, fille et héritière de
Philibert Geay dit Barbotte, laboureur audit St Martin
et
François Roncin, propriétaire audit St Martin, mari
et exerçant les actions de Jeanne Billard, fille et héritière
de Jean Cécile Billard aussi manouvrier audit St Martin
et
disent que tant par eux que par leurs auteurs, ile étoient
censitaires de Monsieur le Duc de Nivernais à cause de différentes
parties d'un canton de bois et buissons situés au finage
dudit St Martin, lieu dit Les Issards et plus communément
les Buissons de St Martin, qu'ils possédoient et dont ils
jouissoient indivisement en faisant paccager leurs bestiaux et en
y prenant du bois pour chauffer leurs fourgs.
Les
autres parties de ce bois étoient possédées
à même titre de cens de mondit sieur le Duc de Nevers
par Monsieur Espiard de Mâcon, le sieur Laligant de Saulieu
et la Cure de St Martin dont la jouissance étoit commune
avec eux.
Cette
jouissance ayant été reconnue onéreuse et préjudiciable
aux intérrêts des propriétaires, ils saisirent
la circonstance ou Monsieur le Duc du Nivernais faisait procéder
à la rénovation de son terrier, pour procéder
entre eux au partage et division dudit bois, en conséquence
et le 02/07/1786, ils limitèrent les portions de Monsieur
de Mâcon, du sieur Laligant, et de la Cure. Dont acte fut
dressé pardevant Me Herard notaire commis pour
cette rénovation à la résidence de Visigneux,
après quoi chacun fit séparément sa reconnaissance
audit terrier des objets à lui avenir suivant ledit partage
et sous la redevance dont il étoit affecté.
Le
29/08/1788, ledit Lazarre Collenot et consorts procédèrent
entre eux à la sous division de la partie des bois qui leur
arriva par le partage primitif. Dont acte fut dressé par
Me Darnay notaire à Saulieu, controllé
le même jour qui est le 29/08/1788.
Ces faits sont constatés
par différents actes qui ont échappé aux flammes
révolutionnaires, les autres actes faits dans l'intérêt
de Monsieur le Duc de Nevers ont été livrés
au feu en exécution d'une loi de colère subversive
des droits de la société.
Les actes existant sont
ceux des reconnoissances de Messieurs de Mâcon et Laligant,
le partage de la sousdivision entre les exposants avec un plan du
premier partage du 31/12/1787, le tout ci-joint à la réserve
de la reconnoissance dudit sieur Laligant.
La Révolution étant
survenue quelqu'années après touttes ces opérations,
ladministration municipale de St Martin, à l'instigation
de quelqu'uns des habitans jaloux de la propriété
des exposants comprit dans ses biens communaux les portions de Bois
des Issards arrivées aux suppliants et audit sieur Laligant.
Celle de Mr de Mâcon
ayant été comprise dans le séquestre de ses
biens, et la portion de la Cure ayant été vendue,
elles furent respectées.
La force de l'orage étant
passée, la justice ayant repris son cours, le Sr Laligant
s'est pourvu devant les tribunaux en relachement de la portion de
bois contre la commune de St Martin où il a obtenu justice
avec dépens contre elle ; l'arrêt confirmatif du premier
jugement a été rendu contradictoirement à Dijon
le 07/07/1812. Maintenant il est saisi du possesseur de sa portion
de bois, celle de Mr de Mâcon n'ayant pas été
vendue, elle lui a été restituée par le Gouvernement
à son retour de l'émigration et ses héritiers
en jouissent tranquillement.
Il en aurait été
de même des portions des suppliants après le jugement
du procès de Mr Laligant, si l'administration forestière
ne les eut comprises dans l'aménagement des bois de cette
commune, les fait garder et les administrer selon les lois sur cette
matière, comme s'ils étoient véritablement
des bois communaux.
Cependant
les suppliants voulant faire cesser un abus de pouvoir des autorités
locale et administration forestière ont été
conseillés de recourir à votre autorité Monsieur
et de conclure à ce que vu la grosse de la reconnaissance
faitte par Mr de Mâcon au papier terrier de Nevers le 26/07/1786
que l'héritier de Mr de Mâcon a bien voulu leur communiquer,
la copie du plan jointe et la grosse de l'acte de partage fait entre
eux de leur portion de bois devant Darnay Nre à
Saulieu le 29/08/1788. Ensemble l'exécutoire de dépens
décerné contre les habitants par la Conv du 19/08/1812
au proffit de Mr Laligant,"
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Pierre
Lazare COLLENOT, maire de St Martin, dans une lettre qu'il écrit
le 15 septembre 1818 au Préfet de la Côte d'Or
Le bois des
Issards, une affaire de famille ?
Cinq
individus du hameau de St Martin et moi avons éprouvé
il y a plusieurs années une injustice notoire contre laquelle
nous avons réclamé tous les six par une pétition
accompagnée de nos titres, que nous avons eu l'honneur de
vous adresser en février 1818.
Il
s'agit d'un canton de bois nommé Les Issards de St Martin
dont nous jouissions à titre de propriété individuelle
et qu'on considère aujourd'hui comme bois communaux de ce
hameau de St Martin.
A
la vue de notre juste réclamation et des pièces à
l'appui, vous ordonnâtes, Monsieur le Préfet, une réunion
du Conseil Municipal composé des membres des sept hameaux
qui composent cette commune, pour vous faire connaître l'avis
de la commune à cet égard.
Cet
avis unanime fut qu'en effet le canton des Issards étoit
en avoir de tems immémorial, été la propriété
individuele des six réclamants, que division en avoit été
faite dans un temps entre eux, et que les bornes de ces divisions
en existoient encore, que les six réclamants ou leurs auteurs
étant parents et vivant ensemble en bonne armonie. Ce bois
resté commun entre eux six, pour simplifier sa garde, et
pour offrir un pacage plus commode et plus étendu à
leurs bestiaux, et enfin que ce n'étoit que de cette jouissance
volontaire et en commun entre eux six qu'on avait conclu que la
communauté existoit pour tout le hameau.
C'est
le 22 mars 1818 que cet avis fut renvoyé à la Sous
Préfecture à Beaune. Depuis ce tems, Monsieur le Préfet,
nous n'entendons plus parler de cette affaire. Pétition,
titres, plans, et tout ce qui y est relatif ne nous revient point,
notre bois continue à être administré comme
bois communal, ce qui nous cause un tort notoire.
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Pierre-Lazare
COLLENOT, à l'occasion de l'échange d'une parcelle
du bois des Issards avec Louis-Auguste COUHARD, le 8 novembre 1822
Les "temps
orageux" de la Révolution sont passés et un bon
accord vaut mieux qu'un mauvais procès...
"Il
a été dit qu'ils étoient sur le point d'entrer
en procès relativement à un canton de bois appartenant
au dit Sr Collenot scitüé sur le territoire du dit St
Martin, joignant du levant un autre canton de bois appartenant à
Martin Bouremard et le Sr Couhard de midi, à la Pature des
Vernay du Sr Couhard, chemin qui conduit de Conforgien à
St Martin entre deux, de couchant au bois des héritiers de
François Charles, du Sr Couhard, et de nord à Mr de
Beauveau.
Le
Sr Couhard prétendant qu'il a des droits dans led bois ;
de son côté le Sr Collenot soutient qu'il est le seul
propriétaire, qu'il le tient par bail à cens passé
pardevant Me Hérard notaire à Vezinieux le deux juillet
mil sept cent quatre vingt six contrôlé à Lorme
le douze du même mois et encore l'année dernière
il a été renvoyé en possession du dit bois
par M. le préfet du département de la Côte d'or
qui en a déssaisi l'administration forestière qui
s'en étoit attribué la régie en des temps orageux.
Tels sont les dire des
parties qui s'étant rapprochés ont considéré
que la valeur du bois ne mérite pas d'entreprendre un procès
si considérable ont préféré de part
et d'autre faire un petit sacrifice pour maintenir la paix et la
bonne intelligence qui a toujours régné entre elles."
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